lundi 18 mars 2024

Lettre à mon député

NB: vous pouvez reprendre cette lettre, en la modifiant au besoin, en particulier les passages sur le vote pour l'aider à l'Ukraine (vérifiez ce qu'a voté votre député) et le soutien  à la proposition Haddad/Bayou

 

Monsieur le Député,

 

Je vous écris au sujet de la guerre en Ukraine. Comme beaucoup de Français, c'est un problème qui me préoccupe fortement depuis maintenant plus de deux ans.


Deux ans que, chaque nuit ou presque, la Russie continue ses attaques terroristes à coups de missiles, de drones kamikaze et de tirs d'artillerie lourde contre les villes et villages ukrainiens. La Cour Pénale Internationale a récemment émis deux mandats d'arrêt contre l'amiral Sokolov et le général Kobylach qui ont donné l'ordre de mener ces bombardements meurtriers contre des civils. L'exemple récent de la double frappe à Odessa, où les Russes ont délibérément utilisés deux missiles très précis (un pour frapper un immeuble d'habitation, le second pour tuer les secouristes alors qu'ils aidaient les victimes de la première frappe) montre que les Russes cherchent à maximiser le nombre de victimes civiles, ce qui est un crime de guerre.

Deux ans que les territoires occupés par l'armée russe sont le théâtre d'exécutions sommaires, de scènes de torture, et de déportation des enfants ukrainiens, un crime pour lequel Vladimir Poutine est lui aussi poursuivi devant la Cour Pénale Internationale. Ce dernier crime, particulièrement horrible, est encore pire quand on sait le destin que Poutine réserve à ces enfants: les endoctriner puis les utiliser comme "chair à canon" pour sa prochaine guerre, comme l'ont annoncé des journalistes de la télévision publique russe. Certains pourraient croire que cet avis n'engage pas le Kremlin, mais c'est mal connaître la Russie de Poutine.

Dans cette Russie-là, il n'y a plus de liberté d'expression: ceux qui s'opposent à Vladimir Poutine, comme Anna Politkovskaïa ou plus récemment Alexei Nalvany, sont condamnés à de la prison et/ou assassinés. Les "journalistes" qui apparaissent régulièrement à la télé russe sont donc tous, sans exception, de simples relais de la propagande du Kremlin. Aussi quand des gens comme Vladimir Soloviev ou Dimitri Medvedev menacent chaque jour ou presque de larguer des bombes H sur les différentes capitales européennes ou de déporter les Ukrainiens en Sibérie pour les "rééduquer", ils sont la voix du pouvoir russe. Poutine ne cache donc pas à sa population son ambition impérialiste ni la méthode brutale qu'il compte employer pour soumettre non seulement l'Ukraine, mais aussi le reste de l'Europe.

 

Face à cette menace clairement formulée, que fait la France ? Certains hommes politiques français veulent négocier, espérant qu'un traité accordant des gains territoriaux aux Russes suffira à stopper Poutine. C'est vite oublier que les victoires de Poutine en Tchétchénie (2000) et en Géorgie (2008) n'ont pas réduit les ambitions de Poutine, bien au contraire. Ces mêmes hommes politiques français affirment que si l'Ukraine se déclare "neutre" (hors de l'OTAN), Poutine ne l'envahira pas une nouvelle fois. Or, l'Ukraine était neutre en 2014 quand les forces spéciales russes ont envahi la Crimée et une partie du Donbas. La Russie était pourtant une des garantes des frontières de l'Ukraine, qu'elle avait reconnu formellement. Elle était tout aussi neutre en 2022 quand Poutine a décidé de lancer son invasion de l'ensemble du pays.

La vérité est donc que Poutine se contrefiche des traités qu'il signe, des résolutions de l'ONU (comme celles interdisant le commerce d'armes avec la Corée du nord, et que la Russie avait votées). La seule chose qui a empêché les Russes de conquérir Kyiv, ce qui les a chassé de Kharkiv et de Kherson, ce ne sont pas des accords diplomatiques ou de belles promesses, mais bien le courage des Ukrainiens et la force des armes. 


Or, des armes et des munitions, les Ukrainiens en manquent cruellement en ce moment, ce qui explique leur défaite à Avdiivka début 2024. Plus que jamais, l'Ukraine a donc besoin de l'aide de la France pour gagner cette guerre que Vladimir Poutine impose à tous. Je donc tiens à vous remercier pour votre vote favorable, le 12 mars 2024, sur la stratégie d'aide à l'Ukraine. Mais je crains que cette stratégie qui vient d'être votée manque encore d'ambition pour faire face à l'ampleur de cette guerre et par les ressources que la Russie moblise. En effet, celle-ci est en pratique (et non seulement en parole) passée à une économie de guerre, dépensant chaque année plus de 100 milliards de $ pour son effort de guerre, tandis que le soutien américain à l'Ukraine est de plus en plus incertain, car Donald Trump y est opposé.

Il y a quelques jours, Victor Orban a rencontré Donald Trump, et a confirmé que ce dernier supprimera toute aide à l'Ukraine s'il revient au pouvoir. Par ailleurs, Donald Trump a aussi déclaré qu'il laissera tomber les Européens  et encouragera même la Russie à les envahir. Or, une victoire de Donald Trump est possible, si ce n'est probable, en novembre prochain, et il faut que la France et l'Europe se préparent à cette éventualité. D'autant plus que, même si Trump perd les élections, il serait tenté d'obtenir par la sédition ce qu'il n'aurait pas obtenu par les urnes, de manière bien plus vicieuse et/ou bien plus violente que ce qui s'est passé le 6 janvier 2021. Ces futurs problèmes doivent être anticipés dès maintenant, quoi qu'il en coûte.


Il faut donc que l'Europe se donne les moyens de vaincre militairement la Russie sans le soutien des USA, et la France, en tant que première puissance militaire de l'Union Européenne, se doit d'être à la hauteur. La France peut en faire plus, doit en faire plus, pour augmenter sa production d'armes et de munitions et en livrer à l'Ukraine. Une tribune publiée dans Le Monde (31/01/2024) et une pétition, initiée par l'association "Pour l'Ukraine, pour leur liberté et la notre!", posent les bases de ce qu'il faudrait faire:

  • augmenter la cession, la fabrication et les livraisons d’armes et de munitions ;
  • donner des garanties aux industriels de l’armement ;
  • se doter, avec nos partenaires européens, d'un organisme de contrôle pour assurer un embargo strict sur l’exportation des technologies duales ;
  • encourager la mutualisation des outils de production, civils et militaires, au service de la défense ;
  • mobiliser de nouvelles ressources financières en faveur de l’aide à l’Ukraine.

Cela nécessite un effort budgétaire conséquent et qui doit être débloqué en urgence, puis continué sur une longue durée pour être efficace. Je suis conscient, Monsieur le Député, que vous devez recevoir de part et d'autres de nombreuses sollicitations pour consacrer plus d'argent public pour régler tel ou tel problème. Il existe cependant des moyens de mobiliser pour l'Ukraine les avoirs russes "gelés" dans nos banques, comme le proposent vos collègues Julien Bayou et Benjamin Haddad, et je vous remercie de soutenir cette proposition.

Je sais aussi que d'autres problèmes peuvent sembler plus urgents selon ce qui se dit dans les média. Mais si j'attire votre attention sur ce problème aujourd'hui, c'est parce que nous sommes maintenant au pied du mur, que Donald Trump sera peut-être élu très prochainement, et que depuis deux ans la France, comme les autres pays occidentaux, n'anticipe pas assez. Et chaque fois que nous tergiversons,  chaque fois que nous reportons notre aide, chaque jour qui passe, les Ukrainiens en paient le prix du sang, et cela m'est insupportable.

Aussi je vous serai gré, Monsieur le Député, d'en parler à vos collègues (notamment ceux qui siègent à la Commission de la Défense Nationale) et de faire tout ce qui est en votre pouvoir pour que la France mobilise immédiatement ses ressources afin de donner à l'Ukraine les moyens de vaincre la Russie, défendant ainsi sa liberté (et la notre) et assurant sa sécurité et son avenir (et le notre).


Je vous prie d'agréer, Monsieur le Député, l'expression de mes sentiments distingués.


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