Jean-Luc Mélenchon a publié sur son blog son avis sur la rencontre entre Trump et Poutine. J'ai moi-même analysé cette rencontre. Et s'il y a de rares points sur lesquels je suis d'accord avec Mélenchon, le reste de son texte est tellement contestable (pour rester poli) que ça mérite que je réfute ses "arguments", en essayant de ne pas trop s'énerver.
Texte commenté
Les passages en italique sont de Jean-Luc Mélenchon
C’est aussi une humiliation de plus pour les vassaux européens et les commensaux de l’OTAN qui tiendront la bougie chez eux pendant que les dominants se passent d’eux pour décider de l’avenir de leur continent.
Si je suis d'accord pour dire que c'est une humiliation pour l'Europe (en faite, pour tout le monde à part Poutine), utiliser le terme de "vassaux européens" rappelle (sans surprise) la propagande russe. Et surtout, JLM, qui a œuvré toute sa vie contre l'avènement d'une Europe puissante, est bien hypocrite de reprocher à cette même Europe son impuissance actuelle (un thème qu'il va dérouler tout au long de ce billet de blog).
Car la Russie est une composante de l’Europe. Davantage que la Turquie avec qui pourtant les négociations en vue de son adhésion à l’UE sont pourtant censées continuer.
L'adhésion de la Turquie à l'UE est bloquée depuis 20 ans déjà. Et pourquoi parler de la Turquie ? La Russie agresse ses voisins européens, c'est ça le problème !
Les dirigeants de l’Union européenne ont accepté le scénario conclu en 2008 à Budapest en faveur de l’annexion par l’OTAN de l’Ukraine et de la Géorgie, véritable déclaration de guerre à la Russie.
Oh putain. Il a osé (c'est même à ça qu'on le reconnait). Rappelons à JLM que:
- En 2008, à part une vague déclaration qui n'engage à rien, l'adhésion de l'Ukraine et la Géorgie à l'OTAN n'est tout simplement pas à l'ordre du jour. Ces (futures, possibles) adhésions étaient d'ailleurs refusées par la France et l'Allemagne.
- Une annexion, c'est ce que fait la Russie en envoyant ses troupes et en organisant des "référendum" bidons. Comparer ça à l'adhésion volontaire à l'OTAN, c'est juste indécent.
- Personne ne cherche à "déclarer la guerre" à la Russie. C'est la Russie qui envahit ses voisins (sans déclaration de guerre) comme, en 2008, la Géorgie. Bien entendu, JLM n'en dit pas un mot
De leur côté, les USA ont joué une partie trop compliquée. La Chine ou la Russie, il leur fallait choisir quel était le véritable « adversaire systémique ». Les atermoiements, hésitations et les allers-retours ont embrouillé leur action.
La Chine, c'est la seule puissance actuellement capable de rivaliser avec les USA, et est identifiée comme telle par les Américains. La Russie, c'est le petit caïd qui emmerde ses voisins mais ne peut pas jouer dans la cour des grands. C'est ça que Mélenchon ne comprend pas: jusqu'en 2022, tout le monde fichait une paix royale à la Russie, qu'on se contenter d'ignorer malgré les saloperies qu'elle faisait déjà.
En fait, Jean-Luc Mélenchon a le fantasme de la guerre froide, durant laquelle la Russie (enfin, l'URSS) était la grande rivale des USA. Comme Poutine, il n'arrive pas à accepter le fait que ce n'est plus le cas, qu'elle a été remplacée dans ce rôle par la Chine. L'invasion de l'Ukraine par la Russie a obligé les USA à réinvestir un terrain, l'Europe, qu'ils étaient en train d'abandonner depuis la fin des années 1990.
Trop tard maintenant. Poutine a gagné la guerre parce que l’Ukraine ne peut la gagner sans un engagement des USA d’une ampleur qui n’est plus à l’ordre du jour.
Mélenchon disait déjà ça le 26 février 2022. Niveau d'analyse militaire = zéro.
Les USA ne peuvent donc pas se tirer d’affaires en vainqueurs. Ils devront accepter qu’une nouvelle carte de l’Europe soit dessinée.
Hé, Méluche, c'est Trump qui veut aider Poutine a avaler une partie de l'Ukraine alors que les Européens et Ukrainiens s'y opposent. Trump va pas "devoir accepter", il veut offrir à Poutine ce que ce dernier ne peut pas obtenir militairement.
Pour finir, l’Europe politique y aura donc laissé sa peau. Elle a prouvé qu’elle n’existe pas et n’en a ni la volonté ni les moyens. Plus que jamais ce sera l’Europe allemande. C’est-à-dire le néant.
Ah, la germanophobie habituelle de Mélenchon. Il revient toujours à ses petites obsessions. Au fait, l'Europe a largement les moyens de vaincre la Russie, même sans les USA. C'est la volonté politique qui lui fait défaut. En particulier à cause de la "5e colonne russe" dont fait partie JLM.
L’Ukraine pensait pouvoir compter sur les USA surtout et sur les européens aussi pour garantir son indépendance contre l’invasion dont elle fait l’objet.
Et sans la trahison de Trump, elle aurait pu compter sur ce soutien. C'est Trump, a.k.a. Krasnov, qui veut forcer l'Ukraine à la capitulation (la grande majorité des américains étant pro-Ukraine).
Elle sait à quoi s’en tenir. Elle ne peut plus gagner.
Si. Ce n'est pas évident, cela va demander que les Européens arrêtent d'avoir peur de leur ombre et y mettent les moyens, mais il y a un chemin vers la victoire.
tout concourt à l’effondrement : avoir interdit les syndicats et les partis d’opposition,
C'est un copier-coller de la propagande russe. Ce ne sont pas "les" syndicats et "les" partis d'oppositions qui sont interdits, mais un certain nombre d'organisations complètement noyautées par les espions russes. D'autres partis d'opposition, dont le principal, celui de Poroshenko, sont toujours autorisés.
avoir maintenu Zelenski en place alors que son mandat présidentiel est fini,
C'est un copier-coller de la propagande russe. Le mandat de Zelensky a été prolongé selon les dispositions de la constitution ukrainienne. Zelensky lui-même dit qu'il quittera le pouvoir dès que la paix sera signée.
avoir tenté de sauver les corrompus qui pillent l’effort de guerre, les désertions massives,
Mélenchon parle de la Russie ?
tout cela a brisé le lien unissant le système Zelenski à son peuple en guerre
Zelensky a un taux d'approbation supérieur à 60%. Bien au dessus du score électoral de Mélenchon.
Les bonimenteurs sur l’alliance OTAN comme garantie de défense vont manger leur chapeau.
L'OTAN est une garantie de défense très forte (ou du moins l'était jusqu'à la trahison de Trump). C'est pour ça que l'Ukraine veut y adhérer.
Au demeurant, compte tenu de la nature des liens qui unissent les USA et Netanyahu, il est peu probable que le divorce entre atlantistes ait lieu.
Heu ? C'est quoi le rapport entre l'Ukraine et Netanyahu ? Mélenchon croit-il que Netanyahu contrôle l'OTAN comme dans les plus gros clichés antisémites ?
Pour nous plus que jamais, compter sur qui que ce soit d’autre que soi-même pour se défendre est une naïveté qui se paiera toujours très cher.
Ah, enfin une phrase sur laquelle avec laquelle on ne peut être que d'accord. Nous Européens devons prendre notre destin en main. Mais la germanophobie et l'europhobie maladive de Mélenchon l'empêche de voir que ce n'est qu'unis que les Européens auront la puissance nécessaire pour défendre leurs intérêt et s'opposer aux Russes.
Le départ de Zelenski est la condition de l’accord. Tout simplement parce que son mandat est fini et que je ne crois pas la Russie capable de signer quoique ce soit avec quelqu’un bientôt remplacé par un autre qui pourrait tout remettre en cause.
C'est la signature de la Russie qui ne vaut rien. Et ce n'est pas à la Russie de décider de qui dirige l'Ukraine.
Mais en l’absence de la Chine aucun arrangement n’a de valeur stable. Et Poutine ne lâchera pas son alliance chinoise contre les promesses des paltoquets de la fin d’empire US et de leur ribambelle de marionnettes confuses en Europe. Il aura raison. Une telle étape porte en elle d’autres orages.
Je ne sais pas dans quel délire Mélenchon est parti. C'est quoi, cette histoire avec la Chine ? La Chine s'en fout de l'Ukraine.
Je note pour mémoire à cette occasion : sur cette base les appétits de bouts d’Ukraine en Pologne et en Hongrie seront rallumés.
C'est un copier-coller de la propagande russe. Qui veut faire croire que l'Ukraine sera dépecée et que la Pologne et la Hongrie vont en récupérer un partie.
Dès lors, d’une façon ou d’une autre, la question des frontières va revenir plus forte que jamais. Nous avions proposé une conférence des frontières sous l’égide de l’OSCE en 2016. On me fit le procès stupide de m’accuser de vouloir les changer. J’argumentais qu’elles le feraient sans nous. Et que mieux valait prendre les devant en organisant la discussion que de subir les guerres que ce genre de situation déclenche.
Donc Mélenchon voulait effectivement changer les frontières, et accepte implicitement l'impérialisme russe qui entend le faire par la force.
Mais encore une fois, souvenons-nous que les frontières de l’ancien bloc soviétique n’ont jamais été stabilisées comme je l’ai rappelé à l’instant à propos de la Pologne et de la Hongrie.
Dans l'ensemble, les frontières ont été stabilisées pacifiquement. Les frontières qui n'ont pas été "stabilisées" (transnistrie, Géorgie, etc), c'est parce que la Russie post-soviétique les a destabilisés par des actions clandestines. Idem pour la Yougoslavie, où c'est la Serbie qui a tenté d'empêcher l'indépendance de la Slovénie, de la Croatie, la la Bosnie, en les envahissant.
Quant aux frontières de l'Ukraine, elles ont été reconnues formellement par la Russie dans une série de traités. Traités que la Russie a ensuite violés sans vergogne. En 2008, Poutine lui-même affirmait qu'il n'y avait pas de conflit territorial avec l'Ukraine.
Bref, la rencontre de Trump avec Poutine sur le détroit de Behring peut être un énorme franchissement de seuil. Seul les USA assument un risque dans cette affaire. Celui de revenir sans aucune décision validée.
Effectivement, Poutine a mené Trump en bateau
Quant aux européens, ils n’ont aucun moyen de tirer si peu que ce soit quelque avantage que ce soit… Tel est le bilan réel de tous les bavards qui nous ont saoulé depuis 2005 avec leur coup de menton, leur insupportable arrogance atlantiste et leurs ritournelles à l’eau tiède sur l’avenir merveilleux de leurs plans. Leur temps est épuisé comme leur projet.
Toujours le blabla de Mélenchon, qui regrette l'impuissance de l'Europe tout en refusant que l'UE devienne une puissance. Quel tartuffe !
Un gouvernement insoumis aura les mains libres pour engager tout autre chose, tout autrement pour que la France puisse déployer son offre de non-alignement altermondialiste. Une tout autre Europe peut être en vue.
On connait le principe du "non-alignement" de Mélenchon (qui transparaît entre les lignes de son blog): c'est de tout céder à Poutine. Mélenchon veut d'une Europe paillasson sur laquelle le boucher du Kremlin pourra s'essuyer les pieds.
Résumé
Ce billet est un peu décousu. Mais si on résume le texte de Mélenchon, on y trouve surtout:
- du copier-coller de la propagande russe
- ses diatribes habituelles contre les Américains, les Allemands, et mêmes contre la Turquie et Israel qui sont pourtant hors sujet
Et surtout, on n'y trouve pas:
- de mention de l'impérialisme russe, cause de ce conflit
- de proposition pour refuser le découpage de l'Ukraine
- plus généralement, d'analyse des enjeux, de rappel du contexte, bref, de tout début de réflexion
Mélenchon raconte souvent des conneries sur l'Ukraine. J'ai expliqué pourquoi il peut être considéré comme un poutiniste. Et, dans ce billet de blog, il a trouvé les moyens de se surpasser. Tout ce qu'il a écrit est d'une pauvreté affligeante. Et c'est dommage, car sur d'autres sujets, il apporte des éléments factuels, qui nous apprendre des choses qu'on soit d'accord ou non avec sa vision politique. Mais là, il n'y a rien à sauver.
Les contradictions politiques
- JLM voudrait que la France soit une grande puissance. Or la France a perdu ce statut avec la décolonisation. JLM,qui est opposé à la colonisation, rejoint en cela des personnalités d'extrême droite comme Eric Zemmour qui ont la nostalgie de cette époque.
- Dans le même temps, il refuse l'avènement d'une Europe-puissance. L'Europe, contrairement à la France seule, a les moyens (humains, financiers) d'être une grande puissance ... à condition d'être unie politiquement, ce que refuse Mélenchon
- JLM dit vouloir des relations internationales basées sur le droit, le refus de la guerre, et en même temps il se veut un tenant de la RealPolitik, prêt à s'allier avec des crapules comme Poutine (et Assad, quand ce dernier était au pouvoir). Il ne propose rien pour s'opposer aux ambitions impérialistes des Russes, et propose juste de se coucher et d'accepter par avance toutes les revendications russes
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